A la suite du "tournant pratique" de la philosophie des mathématiques, certains auteurs, parmi lesquels G.Heinzmann et M.Detlefsen, ont décelé en Poincaré un précurseur de ce courant. En témoigne selon eux l'insistance portée par Poincaré à la notion de compréhension pour appréhender la nature même des mathématiques, à rebours des conceptions contemporaines contre lesquelles il s'inscrit en faux, et qui entendaient reléguer cette notion dans un chapitre de la psychologie.
Nous voudrions étudier les liens entre cette conception philosophique originale des mathématiques et la pratique du mathématicien Poincaré. De solides arguments, en grande partie issus de Poincaré lui-même, recommandent son travail sur l'Analysis situs comme étude de cas. Là où ses considérations philosophiques devraient le conduire à y privilégier le point de vue géométrique, nous y voyons avant tout Poincaré, semble-t-il, jeter les bases d'un langage algébrique promis à une féconde postérité. Est-il possible d'accorder les idées philosophiques de Poincaré sur les mathématiques avec sa pratique effective de scientifique ?