Des trous dans l'arbre de Porphyre. De la discontinuité que l'existence impose à l'essence
Bruno Leclercq  1@  
1 : Université de Liège  (ULiège)  -  Site web
Place du 20-Août, 7 4000 Liège -  Belgique

Si la catégorisation conceptuelle introduit de la discontinuité dans l'être, l'être peut-il, en sens inverse, imposer sa propre discontinuité à l'entreprise classificatoire ?

Régie par le principe de proportionnalité inverse de la compréhension et de l'étendue, une certaine conception « intensionnaliste » de l'arbre de Porphyre, notoirement soutenue dans la Logique de Port-Royal, prévoit que ce ne soit pas le cas : partout où sont possibles des distinctions du point de vue de la compréhension, il est également possible de séparer des « inférieurs » au sein de l'étendue ; l'ensemble des objets reproduit fidèlement toutes les nuances de la pensée classificatoire. Cette conception trouve un écho contemporain dans la Gegenstandstheorie de Meinong, ainsi que dans toutes les logiques apparentées.

En sens inverse, cependant, une certaine compréhension « extensionnaliste » des notions d'« objet » et d'« étendue » (Umfang), qui les réserve aux objets effectifs, rompt avec le strict principe de proportionnalité inverse et autorise des « trous » ontologiques dans l'arbre de Porphyre : « certaines représentations n'ont pas d'objet », dit Bolzano ; « certains concepts sont vides », répète Frege. Avoir un sens n'implique pas forcément avoir un référent objectif. Et tous les découpages sémantiques n'ont pas de pendant ontologique.

Nous évaluerons les avantages logiques respectifs des deux points de vue avant de distinguer et discuter deux conceptions – meinongienne et kripkéenne – des rapports entre essence et existence.


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