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L'étude des systèmes symboliques repose pour une large part sur la différenciation entre les systèmes analogique et digitaux, que Nelson Goodman a élaborée dans son essai Langages de l'Art. Cette différenciation est une traduction directe du problème posé par l'analyse philosophique du discret et du continu. En bref, le partage est le suivant : selon qu'on privilégie un point de vue épistémologique ou un point de vue esthétique, on s'intéressera plutôt au fonctionnement digital des symboles, caractérisé par un procès de sélection et de traitement de l'information, ou plutôt à leur fonctionnement analogique, caractérisé par une forme d'infinitisation du sens et de l'information. Un symbole fonctionne de manière esthétique lorsqu'il s'interprète selon une logique du continu (infinitisation du sens, opacité de la référence, saturation du symbole). Toutefois, l'originalité de l'analyse de Goodman est de montrer que lorsque nous passons d'un régime digital à un régime analogique nous faisons appel à un procès de supplémentation qui a également une valeur épistémologique et cognitive. Non seulement la théorie des symboles de Goodman est à l'origine d'une distinction qui a eu une grande fécondité philosophique, mais cette théorie a dès le départ été formulée d'une manière telle qu'elle ne puisse être réduite à des partages trop simples ou trop naïf entre l'art et la connaissance.
Je proposerai donc dans cette communication de 1) montrer comment l'analyse philosophique du discret et du continu imprègne toute l'œuvre philosophique de Nelson Goodman, 2) que la supplémentation (mécainque inductive) est au moins aussi intéressante que la sélection (encodage digital) à titre de procédé fabrication de monde (worldmaking); 3) que la différence entre analogique et digital permet de repenser à nouveau frais, à partir d'une analyse seulement logique, le problème de la définition de l'art.
